Propos raisonnables sur le covid
J’aimerais, sur ce sujet difficile et controversé du covid, être vraiment lu, par tous, quelque soient leurs positions, leurs convictions, leurs analyses. Il y a des manipulateurs partout, mais il y a aussi des personnes de bonne foi et désintéressées. C’est à elles que je m’adresse, en espérant contribuer ainsi à atténuer, tarir!, les invectives réciproques.
Mon objectif est de permettre à chacun d’identifier les points d’accord et de désaccord et plus encore d’essayer de mettre en lumière ce qui fonde les désaccords. Une opinion, une décision est toujours la conséquence d’un choix, d’un ordre mis dans les critères d’appréciation de la situation ; et aussi d’hypothèses sur le contenu des incertitudes qui l’entourent. Expliciter les critères, mettre en valeur les incertitudes peut, peut-être, permettre un dialogue plus serein, non pas un accord mais au moins une compréhension des désaccords, une compréhension réciproque.
Je ferai quatre remarques préalables :
1-
Nous sommes dans un univers d’incertitudes.
Nous savons certaines choses. Mais il y en a beaucoup que nous ne savons pas.
Pour une part parce-que nous avons relativement peu de recul ; mais plus
encore parce-que nous ne savons pas vraiment comment fonctionne le corps
humain. Nous connaissons un grand nombre de régulations locales (par exemple
l’effet sur le pancréas d’un taux excessif de glycémie), mais nous ne
maitrisons pas la régulation globale. Nous ne disposons pas comme en physique
de lois générales. C’est pourquoi, à la différence de la physique, la médecine
a un caractère prédictif limité, et essentiellement en probabilité. Face aux
incertitudes, l’attitude nécessaire, quelque soient ses convictions, est la
modestie.
2-
La statistique est un outil puissant, mais à
manier avec précaution, car « corrélation n’est pas causalité ».
C’est un outil qui ne peut être utilisé que sur la base d’hypothèses préalables
que l’outil statistique permet de tester. Encore convient-il d’identifier
l’ensemble des facteurs, qui peuvent agir sur le phénomène étudié et de les
isoler. Et même si l’outil statistique est utilisé puissamment en médecine,
avec des résultats indéniables (evidence based médicine), l’absence de
représentation globale du fonctionnement du corps humain induit des limites
fondamentales dans son utilisation (voir par exemple http://chroniquesdaujourdhuipourdemain.blogspot.com/2019/08/quelques-reflexions-sur-la-preuve-en.html
3-
Une décision est toujours un arbitrage entre
plusieurs considérants, plusieurs facteurs. C’est un pari, dans un univers
d’aléas. C’est le rôle du patron, du gouvernant de prendre une décision, dont
il assume la responsabilité, en expliquant les critères auxquels il a donné la
priorité, les hypothèses qu’il a faites face à l’incertitude. Ce n’est pas le
rôle des scientifiques. L’univers de la science est celui de la controverse et
pas de la vérité ; d’une connaissance sans cesse remise en question. C’est
pourquoi, il me semble que les scientifiques qui conseillent un gouvernement
devraient en priorité analyser et expliciter les différentes options avec leurs
forces et leurs faiblesses et être très prudents quand ils font des
préconisations.
4-
En conséquence des choix faits en matière de
médecine, il y a des enjeux financiers extrêmement importants pour les firmes,
leurs actionnaires, leurs dirigeants, comme le traduisent très bien l’évolution
des cours de bourse des opérateurs.
Je ne suis ni médecin, ni biologiste. Je me garderai bien de
prendre parti dans le débat scientifique sur les mécanismes biologiques à
l’œuvre dans le covid et dans les différents moyens envisagés pour y faire face
(vaccins, traitements…). J’essaierai seulement d’énoncer quelques questions, de
mettre en lumière certaines incertitudes, à partir des quelques éléments (très
incomplets) que j’ai pu lire et dont je donnerai bien sûr la référence.
1-la dynamique du virus :
Un virus n’est ni stable, ni constant. Il peut varier en vitesse
de propagation dans la population selon les saisons, et bien sûr selon
l’immunité acquise par une population de façon naturelle ou du fait d’un
vaccin. Il peut muter et évoluer dans sa virulence, dans sa contagiosité.
Que sait-on et qu’ignore-t-on sur la dynamique du
coronavirus.
Eclairer ce sujet est indispensable pour répondre à trois
questions : faut-il faciliter ou au contraire limiter la circulation du
virus ? quelle est la contribution du vaccin à l’évolution de la morbidité,
de la mortalité liée au COVID ? Le vaccin a-t-il un effet sur les
mutations du virus.
2-les options pour agir :
Face à la maladie, outre le laisser faire et les actions
toujours opportunes de prévention générale qui confortent le microbiote et le système
immunitaire (alimentation, vitamine D…), deux leviers de lutte peuvent être
mis en œuvre, le traitement ou le vaccin préventif. Il me semble que dans
le cas du COVID, la priorité a été donnée au vaccin. Il faut s’interroger
pourquoi.
Les produits de santé sont produits par les entreprises
pharmaceutiques, qui comme toute entreprise, choisissent ce qu’elles souhaitent
produire, avec très logiquement, un objectif de performance financière. Les
Etats peuvent les influencer par des incitations financières. Mais en
définitive le choix leur appartient. Les laboratoires pharmaceutiques décident
des recherches qu’elles entreprennent. Et les autorités publiques sont très
largement dépendantes de l’industrie pour apprécier le couple efficacité/sécurité
des traitements, puisque ce sont les laboratoires pharmaceutiques qui financent
et organisent les essais de phase 3, dont c’est l’objet, même si ce sont
parfois des établissements de soins publics qui les réalisent.
Dans le cas du COVID, il me semble que l’industrie
pharmaceutique, globalement, a donné la priorité au vaccin. Pourquoi :
est-ce parce qu’il existait des données scientifiques qui conduisaient à penser
que cette piste était plus prometteuse, en termes de résultats. Est-ce que des
considérations financières ont pu jouer, le marché du vaccin, qui s’adresse à
la population générale étant évidemment plus large que celui du médicament qui
ne vise que les malades.
Il est vrai que l’histoire du Remdesivir montre la
difficulté de mettre au point un médicament efficace. Mis au point en 2015 pour
traiter d’autres pathologies, il a fait l’objet d’essais cliniques sur des
patients atteints de formes graves du covid, qui ont débouché sur une
autorisation de mise sur le marché (AMM) provisoire délivrée par l’Union
européenne sur recommandation de l’Agence européenne du médicament, avant
d’être déconseillé par l’OMS en novembre 2020.
L’ANSM (agence française de sécurité du médicament) a donné,
le 15/03/2021 une autorisation temporaire d’utilisation (RTU) pour deux
anticorps monoclonaux, le casirivimab et l’imdevimab « des données préliminaires issues
des études cliniques suggérant un intérêt de ces traitements dans la
prise en charge des personnes à haut risque d’évolution vers une forme grave de
la COVID-19, quand ils sont administrés au tout début de la maladie ».
En février 2021, la HAS dans une revue des approches
thérapeutiques du covid 21 a précisé que « D’autres études cliniques de
phase III sont nécessaires ou en cours pour confirmer l’intérêt des anticorps
monoclonaux neutralisants ».
https://has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2021-02/veille_covid_fevrier_2021.pdf
En revanche, au même moment (01/04/2021) l’ANSM a refusé
cette recommandation temporaire d’utilisation (RTU) à l’ivermectine pour la prise en charge de la maladie Covid-19 suite
à une demande de professionnels de santé, au motif
que « L’analyse des données
publiées disponibles à ce jour, du fait de leurs limites méthodologiques, ne
permet pas d’étayer un bénéfice clinique de l’ivermectine quel que soit son
contexte d’utilisation, en traitement curatif ou en prévention de la maladie
COVID-19.», tout en soulignant « la nécessité de mettre en
œuvre de larges études cliniques randomisées en vue de conclure sur la base
d’une méthodologie adaptée à la possible utilisation de l’ivermectine dans le
contexte de la maladie Covid-19 » et en concluant que « Cette
position pourra être révisée à tout moment, dès lors que des résultats
d’études cliniques seraient susceptibles, en tenant compte d’une évolution de
la prise en charge standard selon la population cible, de modifier le constat
établi à ce jour ».
Dans sa lettre de réponse à la
saisine, l’ANSM précisait également que « aucune demande
d’autorisation d’essai clinique n’a été soumise à l’ANSM par un
industriel ». https://ansm.sante.fr/actualites/lansm-publie-sa-decision-sur-la-demande-de-rtu-pour-livermectine-dans-la-prise-en-charge-de-la-maladie-covid-19
De fait comme le soulignait le site suisse creapharma.ch,
« l’utilisation de
l’ivermectine contre la Covid-19 reste controversée en tout cas pour certains
médias à la fin juillet 2021, notamment par manque de grandes études cliniques
(lire davantage ci-dessous). Plusieurs (plus de 50) “petites” études ont montré
son efficacité contre la Covid-19 ». https://www.creapharma.ch/medicaments-sommaire/ivermectine
Les « grandes » études cliniques sur lesquelles
se fondent les décisions des agences gouvernementales sont essentiellement à
l’initiative des laboratoires pharmaceutiques, car elles coutent très cher,
devant intégrer un nombre important de personnes, sur une durée significative.
Les industriels, c’est logique, s’intéressent aux
médicaments coûteux et récents, qui leur procurent de la marge. Les médicaments
anciens, génériqués et donc peu chers, ne les intéressent pas. Et ils n’ont
évidemment pas d’objectifs en matière de santé publique ni d’optimisation des
dépenses de santé. On comprend que Merck, un des premiers laboratoires
mondiaux, qui fabrique de l’ivermectine, préfère organiser des essais sur de
nouveaux traitements du covid, tel le molnupiravir, dont le prix devrait dépasser 600$ la
dose, à comparer à quelques euros pour le comprimé d’ivermectine. Et,
naturellement les laboratoires Roche et Lilly étaient mobilisés pour démontrer
l’intérêt du casirivimab et de l’imdevimab (cf ci-dessus).
Par bonheur,
l’université d’Oxford, a inclus l’ivermectine dans un essai à grande échelle, PRINCIPLE, avec l’espoir de
« générer des preuves solides pour déterminer l’efficacité du
traitement contre COVID-19, et s’il y a des avantages ou des inconvénients
associés à son utilisation » comme l’a déclaré un responsable
de l’étude. https://www.fr24news.com/fr/a/2021/06/luniversite-doxford-explore-livermectine-un-medicament-antiparasitaire-comme-traitement-covid-19-2.html
Espérons que
cette étude mettra fin aux débats sur ce traitement ; et regrettons
qu’elle n’ait pas été engagée avec la même vélocité et les mêmes moyens que ce
qui a été entrepris pour les vaccins.
En tout état de
cause, l’affirmation selon laquelle le vaccin est le seul moyen de se
protéger n’apparaît pas incontestable.
La question
de la maitrise des essais cliniques et du rôle des Etats, qui sont souvent
(toujours en Europe), directement ou indirectement, les principaux financeurs
des dépenses de santé, est majeure. C’est un domaine où l’Europe devrait
prendre des initiatives.
3-quelle
stratégie rationnelle pour sa protection personnelle.
Il est rationnel qu’une majorité de personnes prennent
l’option du vaccin pour assurer leur protection personnelle. En effet, le
vaccin a été administré à plusieurs milliards de personnes. La plupart en sont
satisfaites. Il assure une protection, contre le Covid, réelle, même si elle
n’est pas totale ; et diminue l’occurrence de formes graves de la maladie.
Comme pour les vaccins contre la grippe, son efficacité diminue avec le temps,
significativement après 6 mois.
Cette option même imparfaite
pourrait s’imposer à tous si le vaccin ne présentait aucun inconvénient,
a fortiori aucun danger. On peut affirmer que les risques sont très faibles,
mais personne ne peut affirmer que le risque est nul. D’abord
parce-qu’il existe des effets indésirables graves répertoriés. Leur nombre fait
débat, leur lien avec le vaccin aussi. Mais on ne peut contester le
raisonnement du démographe Hervé Le Bras, qui dans un article du journal
« le monde » résolument favorable au vaccin, écrivait en août 2021, « Selon les rapports de l’Agence nationale de sécurité du
médicament (ANSM), les professionnels de santé ont constaté entre janvier et
juillet 2021 un millier de morts en France parmi les personnes ayant subi
des troubles à la suite de l’injection de l’un des quatre vaccins contre le
Covid-19 ». Après avoir
rappelé que ce chiffre a été interprété de deux manières opposées, il
poursuivait :
Les
rapports de l’ANSM concluent après un examen assez approfondi des décès
post-vaccin que, « dans
ces conditions, il n’est pas possible de statuer sur un lien physiopathologique
avec le vaccin ». Autrement
dit, la question reste ouverte. Il est en effet très difficile d’établir
un lien de cause à effet dans de telles circonstances, mais nombre d’éléments
penchent en faveur, sinon d’un lien direct, du moins d’une relation
causale ». Et
il continuait :
« Il est plus vraisemblable que la vaccination ait accéléré l’arrivée
de l’instant fatal, tout comme lors de la grande canicule les personnes les
plus fragiles avaient succombé alors qu’il leur restait peut-être quelques mois
ou quelques années encore à vivre. On ne l’avait su qu’après coup en constatant
une baisse de la mortalité aux grands âges lors des trimestres qui suivirent la
canicule ». https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/08/24/deces-apres-vaccin-ce-qui-est-regrettable-dans-cette-controverse-c-est-la-faiblesse-de-l-enjeu_6092229_3232.html#xtor=AL-32280270-[default]-[android
Par ailleurs on se doit d’être prudent sur les effets à long
terme, puisqu’on n’a pas de données sur le sujet, faute de recul, plus encore
pour les vaccins moderna et pfizer qui utilisent une « technologie »
nouvelle. Je ne sais pas, par exemple, si les vaccins proposés ont fait l’objet
d’études de génotoxicité, de cancérogénicité et de tératogénicité. L’absence de
modèle général du fonctionnement humain et, en conséquence le caractère non
prédictif de la médecine oblige en effet à beaucoup de prudence sur l’évaluation
des effets à long terme. C’est d’ailleurs pour cela que les essais de phase 3
réclament une durée longue. Rappelons à cet égard que les vaccins moderna et
pfizer ont été mis en œuvre bien avant la fin de leurs essais de phase 3,
respectivement le 27/10/2022 pour le premier, le 02/05/2023 pour le
second, ce qui explique probablement que ces firmes ait exigé, dans les
contrats passés avec les Etats, une limitation de leur responsabilité en cas de
dommages liés à leurs produits. C’est d’ailleurs parce-que cette phase d’essais
n’est pas terminé qu’on fait signer à chaque candidat au vaccin (c’est une
obligation légale) une déclaration de consentement éclairé. A chacun de juger
de la réalité de cet engagement.
Il n’est donc pas irrationnel de refuser le vaccin,
au nom du risque immédiat ou à terme qu’il présente, même s’il est tout à fait
minime.
L’argument du « bénéfice-risque » n’est en effet
pas automatiquement, systématiquement favorable à la vaccination si on
raisonne au niveau individuel. C’est éventuellement une affirmation
statistique ; en aucun cas un raisonnement individuel, qui est le fondement
d’un traitement, d’un acte de santé. Il y a en effet une différence essentielle
avec l’approche « bénéfice-risque » dans l’usage d’un médicament par
quelqu’un de malade. Dans ce cas en effet, le risque est effectif, lié à la
maladie. Et il y a un arbitrage légitime à faire avec les bienfaits potentiels
d’un traitement. La situation est toute autre en ce qui concerne la vaccination
contre le covid. Pour beaucoup de personnes en bonne santé, les jeunes et les
enfants en particulier, le risque n’est que potentiel, et encore avec une
probabilité insignifiante, puisque s’ils attrapent le virus ils développeront,
dans la quasi-totalité des cas une forme asymptomatique ou bénigne de la
maladie. Le bénéfice est donc très largement hypothétique alors que le risque
lié à l’administration du vaccin, même faible, est réel.
Il faut rappeler, à cet égard que l’âge moyen des victimes
du Covid est de 82 ans et la moitié des morts ont plus de 85 ans. Les
décès liés au covid touchent, pour leur quasi-totalité les plus de 45 ans (+75
ans 73%, 65-74 ans 18 %, 45-64 ans 8%).
https://fr.statista.com/statistiques/1104103/victimes-coronavirus-age-france/.
Et dans cette distribution, le critère de comorbidité n’est
pas pris en compte. Si on ne considère que les personnes en bonne santé, il y a
fort à parier que le nombre de décès lié au covid parmi les personnes de moins
de 50 ans est négligeable.
Pour une personne en bonne santé, il n’est donc pas
irrationnel de prendre le risque du covid, en faisant confiance à son
système immunitaire, le cas échéant accompagné et encouragé par des aliments et
des substances qui le stimulent, vitamine D, zinc…D’autant plus que le débat
sur les traitements reste ouvert (cf point 2).
4-
Quelle stratégie rationnelle pour une protection collective,
C’est un argument souvent employé par les promoteurs de la
vaccination. Quelque soient les appréciations sur la stratégie individuelle, le
vaccin serait l’outil de la protection
collective ; et se faire vacciner serait, en tout état de cause un acte de
solidarité. Et par conséquent ceux qui refusent le vaccin seraient des
égoïstes. D’où la difficulté de débattre d’un sujet placé d’emblée sur le
terrain de la morale avec une vision manichéenne de ce qui est bien et de ce
qui est mal.
J’ose malgré
tout aborder ce sujet en souhaitant être lu jusqu’au bout.
Puisqu’il
s’agit de protection collective, le sujet central est celui de la transmission
du virus.
Il est avéré
aujourd’hui que le vaccin n’assure qu’une protection limitée contre le virus,
qui diminue avec le temps et que s’il diminue les formes de cas graves, il
n’empêche pas la transmission du virus.
https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/variant-delta/variant-delta-du-covid-19-la-guerre-a-change-craignent-les-autorites-sanitaires-americaines_4722809.html. https://www.lemonde.fr/blog/realitesbiomedicales/2021/11/03/covid-19-nouvelles-donnees-de-leffet-de-la-vaccination-sur-la-transmission-du-variant-delta/
ce qu’a
confirmé très récemment le Président du conseil scientifique, Monsieur
Defraissy : https://www.lefigaro.fr/sciences/les-vaccins-anti-covid-protegent-ils-peu-contre-l-infection-20211123?utm_source=app&utm_medium=sms&utm_campaign=fr.playsoft.lefigarov3
Cela veut dire
que se vacciner n’empêche pas de contaminer l’autre, avec une probabilité
d’autant plus grande que le vaccin est plus ancien. Le message implicite des
pouvoirs publics, un peu corrigé depuis, « faites-vous vacciner et vous
pourrez tout faire comme avant » n’est pas fondé. La vaccination a
entrainé un relâchement des gestes barrières qui a pu favoriser les
contaminations. Heureusement, dans la ligne des recommandations du conseil
scientifique, l’accent a été mis à nouveau sur la responsabilité personnelle,
dans ses comportements.
C’est là, à mon
sens le cœur de la solidarité. Le fondement de la solidarité c’est
l’attention à l’autre, dans son comportement personnel (gestes
barrières, isolement).
Il n’est donc
pas juste d’affirmer que tous ceux qui ne sont pas vaccinés sont des égoïstes
qui ignorent la solidarité. Car la solidarité, en l’occurrence, c’est de
veiller à ne pas contaminer l’autre, particulièrement s’il fait partie des
populations fragiles.
Deux questions
méritent alors d’être examinées :
A-est-on
infecté plus fréquemment, donc susceptible de transmettre le virus, quand on
est vacciné, ou quand on a contracté le covid et donc été contaminé par le
virus.
Je ne suis pas
sûr qu’on sache répondre vraiment à cette question, car l’immunité est un
phénomène complexe, et multidimensionnel. Il y a une grande variabilité selon
les individus, et aussi en fonction du temps. Apparemment il n’empêche pas la
présence du virus dans les muqueuses de la gorge et du nez, qui sont les
sources essentielles de la contagion, par l’air expiré et la salive. En
revanche, il protège les poumons. https://www.jle.com/fr/covid19-vacciner-contre-detection-par-PCR-ou-contre-maladie-covid19 Ce qui explique qu’il n’empêche pas la
propagation du virus mais qu’il protège des formes graves. Il semble donc que se
faire vacciner c’est se protéger soi-même, mais ce n’est pas protéger les
autres.
B-est-il
souhaitable ou non que le virus circule. Il me semble que cette question n’est pas assez débattue.
Plusieurs articles du docteur Sonigo, ancien directeur du laboratoire de génétique des virus à
l'Institut génétique moléculaire (INSERM) montrent que dans la population générale non fragile c’est
la circulation du virus qui assure la protection ( https://www.linkedin.com/pulse/faq-covid-3eme-partie-les-vaccins-pierre-sonigo/?originalSubdomain=fr ). Même si ce point de vue n’est pas unanimement partagé, ce
n’est faire preuve ni d’incompétence, ni d’irresponsabilité, ni d’égocentrisme
que d’accepter que le virus puisse circuler en population générale, dans la
mesure où pour le plus grand nombre, il ne touche que les voies supérieures et
ne génèrent donc que des formes bénignes de la maladie, à condition, bien sûr d’organiser
la protection des personnes fragiles, en particulier celles qui souffrent de
comorbidités, en s’appuyant sur le vaccin si elles le souhaitent. Cela renvoie
au point précédent, « 3-quelle stratégie rationnelle pour sa protection
personnelle ».
En définitive
est-on assuré, comme l’ont déclaré de nombreux responsables politiques, en
Europe que « le vaccin pour tous est l’outil pertinent de la protection
collective ».
Une statistique
est souvent mise en avant pour légitimer cette affirmation, malgré les
interrogations rappelées ci-dessus. Cette analyse des contaminés et
hospitalisés selon leur statut vaccinal est actualisée tous les mois. Je fais,
ci-dessous référence à celle de septembre, complétée par une actualisation sur
novembre https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/sites/default/files/2021-09/2021-09-03%20-%20Appariements%20sivic-sidep-vacsi%20Drees_0.pdf
Les données sur
les contaminations sont difficiles à interpréter, car la population qui se fait
tester n’est pas définie, autrement que par cette décision de demander un test
et aussi parce qu’on ne sait pas conclure sur l’opportunité ou non que le virus
circule (cf ci-dessus). On remarque logiquement que ce sont les plus jeunes qui
sont le plus testés positifs, en même temps qu’ils sont les moins hospitalisés.
Pour ce qui est
des hospitalisations, en soins conventionnels ou en soins critiques, on
constate clairement un taux nettement plus important pour les non vaccinés que
pour les vaccinés. Selon les analyses de la DREES (cf ci-dessus), 80 %
des admissions en soins critiques et 76 % des admissions en hospitalisation
conventionnelle sont le fait de personnes non vaccinées, alors que celles-ci ne
représentaient alors que 32% de la population générale concernée. On constate aussi, en ce qui concerne les
non vaccinés une très grande différence selon l’âge : plus de 450
hospitalisés par millions d’habitants en une semaine pour les plus de 80 ans
contre moins de 100 pour les 20-39 ans. De façon un peu inattendue, on constate
qu’en ce qui concerne les soins critiques, le taux d’hospitalisation ne suit
pas la courbe des âges : 23 hospitalisés de 20 à 39 ans, 66 de 40 à 59,
145 de 60 à 79 ans, mais seulement 43 pour les personnes de 80 ans et plus.
De ces éléments
on tire deux observations, qui, je le crois, sont très largement partagées.
1-la gravité du
covid croit fortement au-delà d’un certain âge. Et je n’exclus pas en outre que
les patients avec comorbidités forment, à tout âge, une part importante des
personnes hospitalisées et en soins critiques.
2- le vaccin
limite fortement (mais pas totalement, puisque l’étude de la DREES
mentionnée ci-dessus nous informe aussi que sur la semaine considérée, parmi
les décès liés au covid, 24% étaient le fait de personnes vaccinées) les
formes graves de la maladie et est donc un efficace moyen de protection pour
les populations à risque vis-à-vis du covid, c’est-à-dire, en priorité les
personnes atteintes de comorbidités.
De même, au début novembre la DREES nous apprend que à
taille de population comparable, il y a environ 12 fois plus d’entrées en soins critiques pour
parmi les personnes non vaccinées que parmi celles qui sont complètement
vaccinées de 20 ans et plus. Faut-il en conclure que, malgré toutes ses limites
(protection imparfaite, diminuant avec le temps, risque de contagiosité réel,
effets indésirables…) la vaccination généralisée est le bon outil de lutte
contre la pandémie ?
Au-delà du
chiffre spectaculaire, « 12 fois plus », il est opportun de
s’intéresser aux chiffres absolus : d’un côté 27 admissions en soins
critiques sur une semaine pour 100000 personnes, de l’autre un peu plus de 2. Et
sur un mois 57 décès pour 1 million d’un côté, 6 de l’autre. Cela signifie que la
quasi-totalité de la population, qu’elle soit vaccinée ou pas, sur cette
période, soit n’a pas été touchée par le covid, soit l’a été de façon limitée.
Et il est probable qu’une partie importante des personnes gravement atteintes,
vaccinées ou non, soient atteintes de comorbidités.
Si le vaccin
était totalement sûr et inoffensif, on pourrait conclure que l’obligation
vaccinale se justifie, au moins pour ceux qui n’ont pas été contaminés par le
covid. Mais, dans le contexte de nos connaissances et incertitudes sur les
effets indésirables graves, faut-il en faire l’outil universel de
protection, voire décréter une obligation vaccinale, alors que pour l’immense
majorité de la population, vaccinée ou non, le covid sera une maladie bénigne
et que l’intérêt ou non d’une circulation du virus n’est, me semble t’il,
pas bien documentée.
5-quelques
réflexions sur les autres enjeux :
Au-delà des
considérants sur la prise en charge de la maladie covid, d’autres enjeux
implicites ou explicites sont présents, la question « économique »
des moyens disponibles à l’hôpital pour traiter les cas graves, celle du risque
que prennent les décideurs politiques face à d’éventuelles mises en jeu de leur
responsabilité, celle enfin des relations de chacun de nous et de notre société
avec la mort.
51-la
question économique : on a beaucoup entendu avancer l’argument de
risque de saturation des hôpitaux par le covid pour justifier des mesures de
restriction susceptibles d’en limiter la propagation. C’est un point qui mérite
naturellement d’être pris en considération. Mais on ne peut le limiter au
covid. Faut-il par exemple limiter la
pratique du ski pour éviter l’engorgement des hôpitaux savoyards, du fait des
fractures, ou les courses de formule 1, activités non essentielles (?), qui
engendrent des accidents rares, mais souvent gravissimes, qui mobilisent de
gros moyens hospitaliers. Et ces arbitrages pourraient se poser aussi en ce qui
concerne les pollutions, la nourriture…Ces questions peuvent paraître
incongrues. Elles soulignent des choix implicites ou non des responsables
politiques, et plus profondément de notre société.
En ce qui
concerne l’affectation des moyens de santé, en 2020 le choix (implicite ou
explicite ?) a été fait de donner la priorité au traitement du covid par
rapport à d’autres maladies, puisque les dépenses globales de santé ont très
peu augmenté en 2020, alors même que celles liées au covid étaient évidemment
en très forte croissance
Cette question
des priorités d’usage de l’argent public dans la santé est une question majeure
absente du débat public, et d’ailleurs très difficile à y introduire. Et pourtant
des choix implicites sont fait en permanence par les pouvoirs publics :
baisse de prise en charge des soins courants/accroissement des remboursements
de médicaments très coûteux ; prévention/traitement,
action sur les
causes des maladies ou sur leurs conséquences : par exemple la pollution
de l’air provoque chaque année un nombre de morts dans des ordres de grandeur
du covid sans que cela provoque l’émotion et la mobilisation médiatique et
gouvernementale, qu’a provoqué le covid, alors même que les victimes n’ont
généralement aucune responsabilité dans l’origine de leur mal (On estime à 1,6 million le nombre
de décès prématurés attribués chaque année à l’exposition aux particules fines
en Inde, contre 400 000 en Europe et environ 40 000 en France, https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/09/22/pollution-de-l-air-l-oms-durcit-drastiquement-ses-normes-pour-eviter-7-millions-de-morts_6095590_3244.html
),
Plus largement
la question de l’affectation globale de l’argent public devrait être au cœur du
débat démocratique. On en est loin.
52 : la
question de la responsabilité :
Chaque acte
qu’on pose engage légitimement sa responsabilité. Cela vaut d’autant plus qu’on
a du pouvoir. On a trop souvent critiqué l’impunité des puissants pour ne pas
se réjouir de la possibilité de les mettre en cause. En ce qui concerne les
dirigeants politiques la responsabilité politique est évidente, devant le Parlement
et les électeurs. On peut s’interroger sur le sens de la responsabilité pénale,
quand il s’agit de décisions liées à leur fonction. Je ne suis pas sûr que ce
soit un signe de bonne santé de la démocratie. Mais de toute façon c’est une
réalité, comme le montre la récente mise en examen d’Agnès Buzyn.
Depuis
l’affaire du sang contaminé, il y a plus de 20 ans, beaucoup de politiques sont
« hantés » par ce risque de mise en cause pénale, dans le domaine de
la santé.
Il y a des
situations relativement faciles à apprécier pour un juge : a-t-on fait des
déclarations mensongères ; a-t-on falsifié des documents, caché
délibérément des informations...
En revanche il
est très difficile, voire impossible, pour un juge, de « faire la
preuve » qu’une décision a été fondée ou non, plus encore dans le contexte
où les connaissances en matière de santé sont parcellaires et évolutives. Il y
a beaucoup d’incertitudes. Le juge est dès lors tenté de prendre pour référence
les affirmations des « autorités » scientifiques, qui deviennent
ainsi des sortes de normes. Ce processus est extrêmement problématique, car il
conduit à gommer la controverse qui est pourtant au cœur de la démarche
scientifique, plus encore dans un champ aussi complexe que celui du
fonctionnement du corps humain et, en définitive à ériger les scientifiques en
« législateurs ». Et les responsables politiques sont alors
naturellement enclins à suivre l’opinion scientifique dominante. Ils sont ainsi
protégés.
5.3- Le
rapport à la mort :
Un de mes amis
est mort très récemment du covid : 88 ans, de lourdes comorbidités ;
non vacciné. Je ne sais ce qu’il portait au plus profond de sa tête et de son
cœur. Mais sa famille, sa femme, ses enfants m’ont déclaré, au moment de ses
obsèques, qu’eux-mêmes n’envisageaient pas de se faire vacciner. Peut-on
reconnaître aujourd’hui à quelqu’un de très âgé, de fragile, le droit
d’accueillir la vie et la mort comme elles viennent.
Pierre-Louis Rémy novembre 2021