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25.9.17

Vive l’impôt sur le revenu

Vive l’impôt sur le revenu

Comme d’habitude en matière fiscale, après les annonces, le passage à l’acte apparaît difficile. L’augmentation annoncée de la CSG « concerne tout le monde », mais pas les retraités les plus modestes, qui en sont exonérés. Les retraités un peu moins modestes pourraient, en revanche, la subir directement, avec un effet de seuil important. Mais on parle pour eux d’aménagements… sur les premières tranches d’impôt sur le revenu. Pour certains retraités, plus ou moins modestes, ceux qui, payant l’IR, sont redevables de la taxe d’habitation , la suppression, progressive, de  celle-ci devrait compenser la hausse de la CSG… à des degrés divers, compte-tenu de la variabilité de cette taxe, selon l’habitat et les lieux du territoire. Et comme la majoration de CSG sera déductible du revenu imposable, son effet net sera d’autant plus faible que les revenus sont élevés.
Sans parler des fonctionnaires ou des indépendants qui ne versent pas de cotisation chômage, sauf mesures compensatoires spécifiques. Pour les bénéficiaires de revenus du capital, la hausse sera « noyée » dans la flat tax de 30%, qui devrait être instaurée au premier janvier 2018. Rappelons-nous, enfin, qu’il existe aujourd’hui, 4 taux de CSG, pour les salariés, un peu plus, sur les revenus du capital, un peu moins pour les retraités (non exonérés) et beaucoup moins pour certains retraités.
L’exonération de la taxe d’habitation ne concernera pas les plus modestes ( déjà exonérés) et créera des effets de seuil importants. La flat tax bénéficiera très prioritairement aux titulaires de revenus les plus élevés.
En fait on assiste, une fois de plus, à de la cuisine fiscale, sans ligne directrice, avec des effets de seuil, du bricolage de mesures correctrices et des explications alambiquées sur le fait qu’il n’y aurait pas tant de perdants que ça (cf les calculs incertains du porte-parole du gouvernement sur le sujet).

Cette situation, qui n’est pas nouvelle, est la conséquence d’un mal français : la répulsion qu’inspire l’impôt sur le revenu, à nos concitoyens, peut-être, aux responsables politiques de tout bord, sûrement,
On se souvient de l’obstination du premier ministre, Manuel Valls, à annoncer des baisse d’impôt sur le revenu, après qu’ait été augmentée la TVA. Emmanuel Macron continue d’affaiblir l’IR, en annonçant une hausse de la CSG de telle sorte que celle-ci apportera à l’Etat des ressources nettement plus importantes que l’IR. Et François Fillon promettait aussi de baisser l’IR…, tout en majorant la TVA.
Or l’impôt sur le revenu est un fondement de la citoyenneté et de la vie collective. Il traduit la volonté d’une nation d’organiser, au service de tous, les activités et les solidarités qui fondent la cohésion nationale. Il conduit chacun, chaque usager, à comprendre que le service public a un coût. Il ne va pas de soi, il n’est pas un dû, mais un bien précieux à respecter.
La logique serait donc que chaque citoyens y contribue en fonction de ses moyens, par l’impôt sur le revenu . Et ce d’autant plus que, chez nous, comme dans toutes les grandes démocraties, celui-ci est progressif, en fonction du niveau de revenu. Il est légitime, en effet, que les plus aisés contribuent, un peu plus, en proportion. A l’inverse la CSG est un prélèvement proportionnel, dans la continuité des cotisations sociales, Plutôt que l’augmenter, il serait plus juste de la diminuer.
Aujourd’hui en France, l’IR ne représente qu’un peu plus de 3% du PIB (moyenne européenne 8%). 54% des français n’ y sont pas assujettis. Et les taux effectifs de prélèvements diminuent pour les revenus les plus élevés, du fait des innombrables mécanismes de déduction et d’abattements (parfois non plafonnés en montant, par exemple, sur les plus-values). Ce sont les classes moyennes un peu aisées, qui subissent les plus forts taux de prélèvements.
C’est pourquoi, plutôt que d’augmenter la CSG, il serait plus cohérent de revaloriser l’impôt sur le revenu, de façon modérée, avec l’ambition qu’il retrouve l’universalité et la progressivité, qui en sont la raison d’être.  

Défendre, promouvoir l’impôt sur le revenu, c’est défendre la République et la démocratie. Il serait bons que les responsables politiques, de tous bords, s’en souviennent.

Oser revisiter l’imposition des plus-values ?

Oser revisiter l’imposition des plus-values ?
Conformément aux engagements pris pendant la campagne présidentielle, le gouvernement a annoncé une modification en profondeur de la fiscalité du capital : suppression de l’ISF sur les titres de valeur mobilières ; instauration d’une « flat tax » de 30% sur les revenus du capital. Ces mesures se traduiront par des transferts importants vers la partie la plus aisée de la population, alors même que les inégalités de revenus et plus encore de patrimoine ont tendance à s’accroître. Elles peuvent cependant se concevoir. L’ISF est un mauvais impôt, comme l’illustre bien les multiples exemptions et restrictions dont il est l’objet. Il s’applique indifféremment sur le patrimoine liquide et non liquide.
Mais il y a là une occasion remarquable de revisiter la fiscalité du capital et en particulier un élément très important, souvent passé sous silence : les abattements d’assiette sur les plus-values, mobilières et immobilières. Pour le calcul de l’impôt, les plus-values liées à la revente d’action, sont de 65% et peuvent atteindre 85%, si la période de détention a dépassé 8 ans. Dans le foncier et l’immobilier, la plus-value s’efface après 22 ans de détention.
Un abattement se justifie, à l’évidence, pour tenir compte de l’inflation, qui, aujourd’hui, a beaucoup diminué. Il peut aussi être la contrepartie de la prise de risque de l’entrepreneur ou de l’investisseur, même si la législation prévoit, à juste titre, que les moins-values viennent en déduction des plus-values, sur une période de dix ans.
Mais est-il légitime que les abattements soient aussi importants et surtout sans limitation de montant. Car la fiscalité des plus-values est, de mon point de vue la forme la plus pertinente d’imposition du capital, puisqu’il s’agit alors de prélèver l’impôt sur un patrimoine devenu liquide. Et le système actuel d’abattement est peut-être une des explications de ce paradoxe mis en lumière, il y a quelques années par T. Piketty, la baisse du taux effectif de l’impôt sur le revenu, pour les personnes disposant des revenus les plus élevés. Rien n’empêche en effet de placer ses revenus dans une société de portefeuille, qu’on liquide de nombreuses années plus tard avec la plus-value correspondant à ce qui s’est accumulé.
Une réforme d’équité, qui n’affaiblirait pas la dynamique entrepreneuriale de notre pays, consisterait à corriger la plus-value du taux d’inflation cumulé, à garder le système actuel d’imposition jusqu’à un certain seuil (par exemple 1ou2 millions d’euros en cumulé sur 5 ou 10 ans) et à organiser une dégressivité des abattements, en fonction du montant, au-delà de ce seuil. La période qui s’ouvre est une merveilleuse occasion de faire cette réforme, à condition d’en avoir le courage.


11.8.17

comment parler des vaccins

lettre envoyée au médiateur du journal le monde

Monsieur le médiateur,
Le journal le monde a créé la rubrique « les décodeurs », avec l’objectif très pertinent, me semble t’il, d’éclairer des sujets sensibles, objets de débats, afin d’aider le lecteur à se faire son opinion. J’en apprécie souvent le contenu.
Permettez-moi dès lors de vous faire part de ma déception de la façon dont a été traitée, dans cette rubrique, la question des vaccins tout au long du mois de juillet. Les argumentaires m’ont semblé sans aucune distance avec ceux émanant du ministère de la santé et des tenant de l’obligation vaccinale élargie, ceux qui avaient une opinion différente apparaissant comme des imbéciles, des manipulés ou des imposteurs manipulateurs. Le journal le monde, que je lis depuis 59 ans (j’avais 11 ans à l’époque) m’avait habitué à plus de recul, plus d’équilibre et plus de discernement,
La question de l’obligation vaccinale est un sujet difficile, controversé, comme l’ont souligné un collectif de chercheurs dans une tribune que vous avez publiée le 31 juillet ; et d’abord pour une raison fondamentale : malgré les immenses progrès de la médecine, malgré l’imposante somme d’observations accumulées, traitées, on ne sait pas encore très bien comment fonctionne le corps humain. Les analyses d’efficacité d’un traitement ou d’une intervention sont de type statistique et gomment la variabilité qui caractérise chaque individu. L’état de santé d’un individu, dépend d’une multitude de facteurs , qui interagissent, on ne sait pas toujours comment. Les effets indésirables sont souvent sous-estimés, surtout si ils se manifestent à long terme.
La science et plus encore la science médicale sont pleines d’incertitude et de controverse, ce qui doit inciter à la modestie, à se méfier des assertions trop catégoriques. Le journal le monde le souligne d’ailleurs de façon fort pertinente, dans de nombreux articles qui traitent de santé publique, par exemple assez récemment quand vous avez décrit la controverse relative aux effets du glyphosate sur la santé humaine. Et vous avez ne même temps mis l’accent sur les enjeux économiques et les relations complexes entre l’univers du business et celui de la science.
Sur un autre registre les notions, essentielles de santé publique et de solidarité doivent être maniées avec prudence, tant elles sont à géométrie variable, en fonction du sujet et de l’intérêt de celui qui les invoque.
L’actualité vous conduira forcément à retraiter de cette question de l’obligation vaccinale. Je croirais utile et cohérent avec vos valeurs, de le faire avec plus de prudence, d’équilibre et de modestie.
Bien cordialement

Pierre-louis Rémy

Inspecteur général des affaires sociales honoraire

3.8.17

Renouvellement ?

Le message central d’Emmanuel Macron et du mouvement en marche a été et est « le renouvellement », des hommes mais aussi des pratiques politiques. Force est de constater que, malheureusement, depuis son accession au pouvoir, les signaux, dans ce domaine, sont clairement négatifs. Un bon exemple est celui, essentiel, de la gestion du budget de l’Etat.
Une difficulté qu’ont rencontré la plupart des ministres dans les gouvernements passés est le poids du ministère des finances et plus précisément de la direction du budget, dans la décision publique. Il est naturellement légitime de prêter une extrême attention à la dépenses publique. L’argent public est précieux. Et il y a encore beaucoup à faire pour améliorer l’efficacité de l’action publique. C’est d’ailleurs pour quoi il y a des marges d’économies budgétaires.
Mais la culture et l’organisation de la direction du budget ne la prédispose à réussir la transformation nécessaire de la gestion publique. C’est d’ailleurs pourquoi la RGPP (révision générale des politiques publiques) a échoué, affaiblissant l’Etat et laissant un goût amer à ses agents.
Le fondement de la culture de la direction du budget est la méfiance, vis-à-vis de tous les autres ministères, « dépensiers » ,… « gaspilleurs », sa vision est de court terme et sa technique, « le rabot ».
Les décisions annoncées du gouvernement, baisse mensuelle et générale de 5€ des APL, gels de crédits dans tous les ministères, en particulier la justice, les universités, la ville…, manifestement sous dotés et où les besoins sont prioritaires portent la signature de la direction du budget : pas de vision, pas de priorité, en un mot pas de sens.
Et rien que de très classique, aucune nouveauté dans la méthode, dans la pratique gouvernementale, dans le système de décision centralisé et technocratique que favorisent les institutions de la cinquième République, plutôt du recul.
Comme l’a exprimé le journal « Le Monde », le président de la République l’a reconnu à demi-mot, en considérant lui-même que les décisions portaient trop la trace du ministère du budget, mais cela n’a rien changé au fond. Et l’annulation récente de 300 millions de crédits aux collectivités locales procède de la même méthode.
Quand viendra le renouvellement ?

                                                                                                     Plr 03/08/2017

6.5.17

Au nouveau président, un sujet oublié dans la campagne et pourtant si essentiel

Au nouveau président, un sujet oublié dans la campagne et pourtant si essentiel :

 Pour une amélioration de la qualité et de l’efficacité de la gestion publique.

C’est un sujet majeur dans notre pays, compte-tenu de la place qu’y tient le service public, pas seulement en termes économiques, et du nombre de fonctionnaires.
C’est un sujet majeur pour tous ceux qui portent l’objectif politique de la solidarité, car c’est un outil essentiel de réduction des inégalités et de promotion de l’égalité des chances ; et les français de toutes conditions et de tous bords politiques y sont très attachés.
C’est un sujet majeur pour tout gouvernement soucieux de bonne gestion et attaché à la réduction de notre dette et à l’amélioration de notre compétitivité ; parce-que, aujourd’hui, à beaucoup d’égards, le service public ne fonctionne pas bien (voir plus bas), ce qui génère : qualité de service inégale et frustration des usagers ; malaise des agents et parfois, conditions de travail très difficiles ; et coûts très élevés. Si l’on souhaite baisser (ou même stabiliser) les prélèvements obligatoires et faire un peu mieux « aimer » l’impôt, il faut améliorer l’efficacité et la qualité du service public.
C’est un sujet très difficile, d’abord parce qu’il est compliqué : il touche à de multiples facettes de la gestion publique, gestion financière, procédure budgétaire, statut de la fonction publique, gestion des ressources humaines…En outre, il ne suffit pas (et c’est déjà difficile) de définir là où on veut aller ; il faut aussi organiser le « passage de l’état A à l’état B », c’est-à-dire mettre en place un processus de conduite de changement, ce qui n’est pas simple. Ce changement ne peut se faire de façon unilatérale ; il appelle des négociations sociales, auxquelles ni les syndicats, ni les DRH des fonctions publiques ne sont préparés.
Quelques éléments de diagnostic :
-Les fonctions publiques sont très étendues (et le processus continue : la loi Déontologie d’avril 2016, a durci les possibilités de dérogation au statut de fonctionnaire pour les établissements publics). Il y a, chez nous, une sorte d’identification entre service public et statut public des personnels, ce qui n’est pas le cas à l’étranger. Ainsi la part des employés du secteur public bénéficiant d’une garantie d’emploi à vie est de 82% en France, contre 43% en Allemagne et moins de 5% dans les pays nordiques. Et la rigidité des fonctions publiques a un corollaire : la multiplication d’emplois très précaires, pour assurer un minimum de souplesse, dans l’éducation nationale, les hôpitaux…A la différence d’autres pays, les salariés et les syndicats font plus confiance au statut public qu’à la négociation collective pour les protéger.
-le mode privilégié de pilotage des services est la norme, généralement à travers des circulaires innombrables élaborées par les différents bureaux d’administration centrale, sans que le souci de la cohérence et de la capacité de mise en œuvre soit toujours présent. Et la norme est générale, donc mal adaptée à la diversité des situations. Le responsable opérationnel est souvent plus dans la situation d’avoir à appliquer des règles multiples (et parfois contradictoires) qu’à rechercher un résultat. Et quand on assigne un indicateur de résultat (cf le nombre d’expulsions de migrants en situation irrégulière sous Sarkozy), il est ponctuel, ne s’inscrit pas dans l’action globale, et provoque donc toutes sortes de dérives.
-le contrôle comptable privilégie la rigueur formelle, ce qui génère des coûts et des délais, mais aussi peut conduire à brider les initiatives des responsables opérationnels et être contradictoire avec les objectifs qui leur sont donnés.
-les règles d’affectation, d’avancement et de mutation donnent un poids prépondérant au statut (aux corps), à l’ancienneté et à des critères personnels (type : rapprochement de conjoints…), beaucoup plus qu’aux compétences, à l’adéquation au poste, à la performance. Selon une comparaison de l’OCDE, la France est le pays où l’affectation est le plus fondée sur la carrière (le statut) et le moins sur les postes (l’adéquation des compétences au poste), c’est aussi presque (après la Turquie !) celui où l’affectation est la plus centralisée (et donc avec une intervention limitée ou nulle du responsable de service).
-le corollaire de tout cela est une faible reconnaissance des agents, une faible écoute de leurs propositions, de faibles capacités d’initiatives et d’innovation.
-les tentatives de réformes de l’Etat ont été jusqu’à présent des échecs : La LOLF, qui devait permettre de privilégier les concepts de missions et de performance dans l’architecture de la loi de finances, a plus généré un nouveau formalisme qu’une évolution du fonctionnement de l’Etat. Et la RGPP lancée par N.Sarkozy s’est traduite par des  diminutions de moyens et des réorganisations formelles, qui n’ont pas amélioré (et plutôt dégradé) la qualité et l’efficacité du service public (et généré une grande frustration des agents). La source de ces échecs tient notamment au rôle majeur que joue la direction du budget, dans le pilotage de la gestion et de la fonction publique, et dans les tentatives passées de réforme de l’Etat. Or ni sa culture, ni ses objectifs traditionnels (encadrer et contenir la dépense publique) ne la prédispose à réussir la transformation nécessaire de la gestion publique.
-il faut enfin souligner qu’au-delà du discours, cet objectif d’amélioration de la qualité et de l’efficacité de la gestion publique est difficile à porter par les responsables politiques ; parce-que c’est un sujet compliqué qui ne se traduit pas en un petit nombre de mesures simples et affichables ; parce-que il demande du temps, beaucoup de temps ; parce-que les changements génèrent des peurs et entraineront inévitablement des conflits, éprouvants. Il faut beaucoup de courage et de persévérance pour se lancer dans une telle démarche.

Pour agir :
Pour espérer réussir, on doit avoir à l’esprit quelques repères essentiels pour l’action.
-on ne réussit pas un changement si on n’est pas au clair sur l’objectif poursuivi, sur ce qui est essentiel et ce qu’on peut abandonner.
-on ne réussit pas un changement si on n’a pas d’alliés qu’il faut identifier, écouter et prendre en compte. Dans le service public, il y a un nombre significatif d’agents de tous niveaux, qui prennent des initiatives et ont envie que cela bouge. Aujourd’hui ils sont souvent étouffés, voire pénalisés. Il faut les valoriser et s’appuyer sur eux.
-le changement bouscule les situations acquises, demande des efforts. Il faut qu’il y ait des contreparties significatives, qui donneront envie à un grand nombre de tenter le pari du mouvement, et qui permettront, peut-être, de trouver des accords avec certains syndicats, dans les indispensables négociations sociales que les changements statutaires appelleront.

Pour réussir, on sera obligé de bouger certains tabous :
-élargir les recrutements (pour les postes non régaliens) à des non fonctionnaires.
-remettre en cause cette fausse approche de l’égalité qui repose sur l’uniformité
-modifier en profondeur la gestion de la fonction publique (décloisonnement, règles d’affectation, d’avancement, de mutation…). Et atténuer, voire supprimer la garantie de l’emploi à vie pour certaines catégories ou dans certaines situations.
-revisiter les responsabilités de l’ordonnateur, du contrôle financier et des comptables, à partir des pratiques constatées sur le terrain.

Il faudra parallèlement faire évoluer en profondeur le mode de management de l’Etat ; gérer des personnes, des situations et non pas des règles, prendre des initiatives, innover et non pas reproduire, jouer collectif autour d’un objectif ; expliquer, écouter, faire partager ; montrer l’exemple ; plus d’autonomie, plus de responsabilité, plus de sanctions, positives et négatives. C’est peut-être le plus difficile.
En définitive il faudra passer d’une gestion fondée sur la méfiance à une gestion reposant sur la confiance, d’un pilotage visant la conformité à un pilotage ayant pour juge de paix, le résultat.


                                                                                             Pierre-Louis Rémy

16.3.17

Lettre d’un citoyen à ses concitoyens :


Aujourd’hui, je ne sais pas encore pour qui je voterai. Et l’argument de B.Delanoé me paraît fragile ; car pour moi l’enjeu n’est pas seulement de faire barrage au Front National, mais plus encore de choisir une personne et une équipe qui aura suffisamment et positivement fait bouger les choses dans les cinq ans à venir, pour que le Front National n’ait pas un boulevard dans 5 ans. De ce point de vue, à ce jour, aucun candidat ne m’a encore convaincu  qu’il est en situation de relever ce défi. D’où ma gêne et mon incertitude.
C’est pourquoi, aujourd’hui, la priorité me semble être de mettre le projecteur sur des sujets cruciaux, ignorés ou mal traités par l’ensemble des candidats.
Sans prétendre à l’exhaustivité, j’en retiendrai 5 :

La fiscalité, très présente dans la précédente campagne et si mal traitée dans celle-ci :
J’attendrais des candidats des projets forts en matière d’’impôt sur le revenu : c’est un fondement de la cohésion républicaine et le seul prélèvement progressif. Pour trouver de nouvelles ressources, F.Fillon privilégie la TVA (plutôt dégressif) et E.Macron, la CSG (proportionnel), alors que notre pays est celui où la part de l’impôt progressif sur le revenu (IRPP) est la plus faible, et de loin, de la zone OCDE. La gauche n’a eu de cesse de diminuer le nombre de français qui le payent et E.Macron lui emboite le pas, en proposant que 80% d’entre eux ne paient pas de taxe d’habitation (au lieu de mettre en place une indispensable refonte de la fiscalité locale, en commençant par une actualisation des bases de la fiscalité foncière, qui attend dans les cartons depuis des décennies). Cela signifie, pour beaucoup de nos concitoyens, que l’argent qui finance les services publics, au niveau national et local, tombe du ciel. Et dès lors les appels à l’efficacité, à la responsabilité devant le SP risquent bien de continuer d’être incantatoires. Une fois de plus, les candidats promettent de s’attaquer aux niches fiscales, mais c’était déjà le cas lors de la précédente législature, avec les résultats que l’on sait.
L’existence d’un taux unique sur les revenus de l’épargne peut se défendre, comme une étape, à condition qu’ils concerne tous les revenus, en particulier l’assurance-vie (ce que semble inclure le projet Macron, mais pas Fillon) et les plus-values mobilières et immobilières, ce qui implique impérativement qu’on revoit les abattements d’assiette (ce que n’aborde aucun candidat). Si on révise en profondeur les abattements d’assiette, cela peut légitimer la suppression de l’ISF : il est bien préférable de prélever l’impôt sur le patrimoine, au moment où celui-ci devient liquide.
L’autre grand absent est la fiscalité sur les successions, alors que la concentration des patrimoines se poursuit, source de rigidités croissantes dans la société française.

L’efficacité des services publics :
C’est E.Macron, qui aborde sans doute le plus le sujet, mais cet enjeu mériterait plus de clarté et plus de force, et d’être beaucoup plus présent chez les candidats qui font de la défense du service public, une de leur priorité. Car le problème français est moins l’étendue du service public (les français y sont attachés, pour une grande majorité), que son efficacité (en avoir pour son argent). On n’avancera pas (ou si peu) dans ce domaine, si on ne modifie pas, en profondeur, deux éléments :
-les règles de gestion financière : le fondement de la gestion publique est encore la méfiance, avec la place « structurante » de la direction du budget et des comptables publics. Tant qu’on ne remettra pas en cause leur rôle, l’objectif de « donner la priorité à ceux qui font » sera vain.
-les règles de gestion du personnel : la France a le triste privilège d’être le pays de la zone OCDE, où les affectations sont plus liées au statut qu’à la compétence, plus effectuées de façon centralisée, que par le responsable opérationnel direct. Tant qu’il en sera ainsi la priorité donnée aux « résultats » sera vaine. Ceci est d’autant plus essentiel que l’extension des fonctions publiques, en France, est extrêmement large (beaucoup plus, par exemple que dans les pays nordiques, grands défenseurs du service public, dont une part importante est assurée pas des salariés de droit privé), situation qu’il faudra faire évoluer progressivement (E.Macron aborde le sujet).
J’ajouterai trois points spécifiques :
-la réforme territoriale : la discrétion des candidats est grande sur le sujet, alors que c’est une grande source de gaspillage d’argent public, pas seulement à cause du « mille-feuilles » qui coûte et déresponsabilise ; mais aussi parce-que l’organisation actuelle conduit à ce que le cadre de la décision publique n’est souvent pas pertinent. On a encore beaucoup à  faire en matière de simplification et de clarification des compétences, avec, en parallèle une refonte de la fiscalité locale.
-la santé : dans ce domaine, majeur pour les conditions de vie des français et les finances publiques, il y a une grande pauvreté des propositions. On peut se réjouir des multiples propositions qui visent à améliorer la couverture des soins de base (en particulier par le régime général, B Hamon), en rupture avec l’évolution de ces nombreuses dernières années, de l’attention mise aux conditions de vie et n’environnement (cf notamment B.Hamon), mais peu de choses sur l’organisation des soins, le fonctionnement de l’hôpital, les traitements très coûteux et pourtant l’annonce d’économies importantes (F.Fillon, E.Macron).
-pôle emploi : pourquoi nationaliser l’UNEDIC (E.Macron), alors que le sujet central est le service rendu par pôle emploi, outil public, qui souffre de tous les maux de la gestion publique.

Les banlieues :
C’est un sujet que je connais mal. Mais j’ai le sentiment que la situation continue de se dégrader et que ces lieux concentrent les problèmes d’identité, d’insécurité, d’emploi, de pauvreté et sont un terreau pour le communautarisme et les extrémismes. Je pense que pour arrêter la dégradation, pour renverser la tendance, il faut un effort massif, dans de multiples domaines : sécurité, éducation, emploi, urbanisme et logement, transport….Aucun candidat ne donne à ce sujet la priorité qui serait, à mon avis nécessaire.

La famille :
Je l’ai souvent dit, il est navrant de laisser le monopole de la « famille » à la droite. A un moment où beaucoup s’interrogent sur notre identité, se plaignent des incivilités, de la perte des repères, il est urgent de reconnaître et de valoriser le rôle de la famille, premier lieu de construction de repères et espace de solidarité. Dans ce domaine, je m’inquiète de la façon dont plusieurs candidats (B,Hamon, JL.Mélenchon et même de façon plus atténuée E,Macron) balaient le caractère familial de l’impôt sur le revenu. Je m’inquiète aussi du vide de la rubrique famille de leurs programmes, que remplit l’objectif de proposer la PMA à toutes les femmes, comme si c’était la priorité d’une politique de la famille.

La démocratie :
Tous les candidats proposent des mesures de moralisation de la vie politique. On peut s’en réjouir.
Mais on doit s’inquiéter en revanche que bien peu de propositions visent à rééquilibrer les pouvoirs entre l’exécutif et le parlement. Rien chez F.Fillon, qui, au contraire met en avant la nécessité de légiférer par ordonnances ; ni chez E.Macron, qui, en revanche, propose même de généraliser la procédure d’urgence ; une restriction du 49/3 chez B.Hamon, mais rien sur la maitrise de l’ordre du jour par l’exécutif.
Cet effacement du Parlement au profit de l’exécutif et d’abord du président de la république est lourd de conséquences. Il a contribué à l’affaiblissement des partis, qui jouent un rôle fondamental dans une démocratie : lieux d’élaboration politique, fondée sur le débat interne ; lieu de sélection des dirigeants. La situation dramatique de cette élection tient, pour partie, au fait que les partis démocratiques ne jouent plus ce rôle. L’élection présidentielle devient une aventure personnelle. Les candidats sont aujourd’hui soit des solitaires, qui s’efforcent de cristalliser un « mouvement » autour de leur personne (E.Macron¸ JL.Mélenchon), soit des vainqueurs de « primaires », contestés dans leur parti. Comment, dans ces conditions créer l’adhésion du plus grand nombre, qui seule permet le changement durable.
Il faut espérer que quelque soit l’élu, il donnera toute sa place aux élections législatives, en évitant d’en faire un référendum autour de sa personne ; et surtout qu’il saura, tout au long de la législature, redonner sa place aux partis, aujourd’hui discrédités, au Parlement et au débat public.
Je ne sais pas pour qui je voterai, en tous cas pas pour les candidats de la fermeture ; à cet égard l’ouverture d’E.Macron à l’accueil des réfugiés est un élément positif.
J’espère que ces lignes, partielles et imparfaites, contribueront à nourrir le débat public, les candidats et les élections législatives qui suivront, qui seules peuvent donner les moyens de gouverner.

Pierre-louis Rémy